Revue De Presse

 

La Montagne - 9 décembre 2001

 

La guerre sur le plateau du go-ban

Le go a inspiré les stratèges, les informaticiens, les écrivains expérimentaux, mais aussi un certain Mao Tsé Toung. Plus qu'un jeu, le go est, dit-on, une voie de la sagesse. On peut commencer à s'y mettre en allant au château de Theix où se déroule le 9e tournoi national.

Le go a beau être un sport éminemment cérébral, ses pratiquants ne se prennent pas la tête. Preuve en est dans l'ambiance qui règne une nouvelle fois au château de Theix où se déroule le 9e Toumoi national de Clermont-Ferrand.

Le point nodal est, comme à l'accoutumé, la buvette où les boissons sont servies à gogo par un des organisateurs membres du GROG, Groupement auvergnat de go, vêtu en fakir!

Quatre-vingts joueurs sont venus des quatre coins de la France (région parisienne, vallée du Rhône, Languedoc-Roussilon, Bourgogne, Anjou, etc.) participer à trois jours de ronde autour du go-ban, ce curieux billot sur lequel sont placées les pierres noires ou blanches.

Parmi eux figurent d'authentiques champions, comme Pierre Colmez, récent champion de France, et celui qu'il a battu en finale Paul Drouot. Il y a aussi ce jeune prodige venu d'Isère, Jérôme Salignon, champion de France 2000 des moins de douze ans, qui multiplie les toumois et qui a gagné pas moins de six niveaux en un an.

Les joutes intellectuelles se déroulent ainsi dans une ambiance bonne enfant, la convivialité n'étant toujours pas un obstacle à la concentration. Et puis, quand les cerveaux s'embrument, certaines font de la trottinette dans la cour d'honneur du château, question de se passer les nerfs.

Car, une fois devant le goban, il faut être concentré, savoir évaluer les rapports de force, savoir économiser ses forces, savoir garder l'initiative, créer les faiblesses chez l'adversaire sans laisser apparaître ses propres incertitudes, éviter d'en vouloir trop, et tenir sa stratégie.

Bref, la facilité des rapports humains que favorise l'organisation typiquement GROG n'empêche pas le sérieux et l'assiduité. C'est que, à force de pratiquer ce jeu de stratégie, l'on sait faire la part des choses.

Du coup, on veut bien croire que le go soit tenu par les Chinois et Japonais comme une voie de la sagesse. Pour s'en convaincre, les visiteurs profanes pourront se rendre aujourd'hui encore au château de Theix où se déroule la dernière journée du tournoi. Première ronde à 10 heures, dernière ronde à 14 heures, remise des prix à 16 heures.

Ils pourront aussi se familiariser avec l'histoire, la culture et les règles du go, grâce à l'exposition en dix panneaux minutieusement réalisés par trois joueurs du club de Nevers: Regino Gorospe, Jean-Paul Gaschignard et René Baroin.

Go et stratégie, écrits sur le go (1), le go et les ordinateurs, le go et les arts (2), les jeunes et le go, l'histoire du go, les règles du go, les notions du go, autant de grands chapitres permettant de se faire une idée d'un jeu qui est à la fois métaphore de la guerre, inspirateur de l'informatique, art subtil, et voie de la sagesse. Bien plus qu'un jeu!

(1) Parmi lesquels, bien sûr, "Le Maître, ou le tournoi de go", de Kawabata, mais aussi "La Joueuse de go", de Shan Sa, très réputé chez les jeunes, ou encore "Je suis un chat" de Natsumi Soski, ou encore ce "Petit traité initiant à la décou-verte de l'art subtil du go", signé Georges Pérec et Jacques Roubaud.

(2) Dont cet étonnant fragment d'un plat à barbe en céramique, en dépôt à l'hôtel Lallemand de Bourges.